Parole de diplômé | Benjamin Courlet, consultant indépendant auprès d’ONG

26.10.2022
  • Parcours études

A la suite d’un Bac Economique et Social, et une année en CPGE (classe préparatoire), j’ai fait le choix en 2008 de rejoindre l’école 3A en première année post bac, afin de pouvoir bénéficier des possibilités de stages au cours de chacune des 4 années de formation. Souhaitant déjà à l’époque travailler dans le domaine de l’humanitaire, j’ai effectué un premier stage au Mali avec une association de bénévoles, avant de rejoindre pour une période de 4 mois le siège de l’ONG Triangle Génération Humanitaire en tant qu’assistant Responsable Programme. Alors en charge du contrôle comptable et de l’appui aux administrateurs missions ; et bien que peu passionné par la gestion, j’ai réalisé qu’il me serait plus facile au vu de mon profil « généraliste » de renforcer mes compétences en comptabilité, gestion et ressources humaines afin de devenir dans un premier temps administrateur à ma sortie d’école, avant d’évoluer potentiellement dans l’avenir vers des fonctions davantage tournées vers la gestion de projet ou la coordination de missions. Ainsi, au cours du stage de troisième année, j’ai travaillé pendant 6 mois en tant que stagiaire Finance au sein de l’ONG ACTED au Tchad. Véritable première expérience terrain au sein d’une ONG internationale, m’ayant permis de mieux appréhender les responsabilités d’un administrateur terrain. Riche de ces différentes expériences acquises lors des trois premiers stages, bénéficiant également de la notoriété de l’école 3A dans le domaine de la solidarité internationale, j’ai intégré au cours du stage de dernière année, l’ONG Première Urgence Internationale en tant qu’administrateur salarié au sein de la mission Haiti. La transition entre l’école 3A et ma carrière professionnelle a donc été particulièrement aisée, sans nécessité la moindre période de chômage ou formation complémentaire.


  • Parcours professionnel

A la suite de mon contrat de 4 mois, j’ai fait le choix de rester en Haïti avec l’ONG Oxfam, d’abord au poste d’administrateur terrain, puis de Directeur Financier. J’avais la responsabilité de superviser un budget de plus de 10 millions d’euros annuel, et de superviser l’ensemble de l’équipe Administration et Finance composée de 4 expatriés et de 15 salariés Haïtiens. Après une mission de huit mois, j’ai ensuite retrouvé Première Urgence Internationale en République Démocratique du Congo, en tant que Coordinateur Administratif, Financier et Logistique. Initialement en charge de la fermeture de mission pendant 3 mois, j’ai finalement été promu Chef de Mission lorsque celle-ci a été prolongée en raison de l’ouverture de nouvelles interventions. Après une année de mission extrêmement enrichissante en termes de supervision de projets, management d’équipes et gestion de la sécurité, j’ai ensuite occupé ces mêmes fonctions en République Centrafricaine lors de la crise politique et sécuritaire entre 2013 et 2014. Passionné par le contexte d’urgence que je venais de vivre en RCA, j’ai alors rejoint l’ONG Handicap International au poste de Chef de Mission voltigeur, en charge de réaliser des missions exploratoires et de lancer de nouvelles interventions en réponse à des crises humanitaires, alliant des situations de conflits armés ou de catastrophes naturelles. Ce fut notamment le cas en RCA, Ukraine et Sri Lanka.

Ces différentes expériences terrain m’ont ensuite permis de rejoindre le siège de Médecins du Monde au poste de Responsable Desk Afrique. Chargé des missions Angola, Libéria, Madagascar et RDC, ces fonctions de support aux équipes terrain m’ont apporté une vision complémentaire de l’action humanitaire, davantage orientée vers l’analyse transversale des contextes d’intervention au niveau national et régional, la planification stratégique, le management à distance des équipes et de la sécurité, ainsi que la représentation et la négociation en direction des instances de représentations internes à l’ONG et des partenaires externes (bailleurs de fonds, partenaires, médias).


  • Poste actuel

Consultant indépendant depuis début 2016, j’appui différentes ONG internationales en matière d’évaluation (missions exploratoires, évolutions intermédiaires et finales de projets) et de management de la sécurité. A travers ces missions de consultance, je suis amené à réaliser des missions courtes dans des contextes très divers, auprès d’ONG variées, nécessitant ainsi une compréhension des enjeux extrêmement rapide et une importante capacité d’adaptation. Je forme également les expatriés de plusieurs ONG à la gestion des risques terrain, et interviens auprès d’étudiants souhaitant se destiner aux métiers de l’humanitaire à travers des conseils en gestion de projets.


  • Un conseil pour des personnes qui souhaiteraient travailler dans la solidarité

En raison du nombre élevé de crises humanitaires à travers le monde (Syrie, Irak, Liban, Népal, Yémen, Centrafrique, Sud Soudan…), venant s’ajouter aux projets de long terme dans les pays en voie de développement, les besoins en recrutement de travailleurs humanitaires aux profils variés sont nombreux, tant pour les ONG françaises qu’étrangères. En parallèle, l’augmentation du nombre de formations destinées aux futurs travailleurs de solidarité internationale semblerait être en mesure de répondre aux besoins du secteur, or la concurrence entre les candidats reste particulièrement élevée, en particulier dans la recherche d’une première mission à des fonctions de « généraliste ». Il est en effet régulier que des candidats diplômés de master, voire de plusieurs, essuient plusieurs refus à leur candidature, faisant craindre un découragement à moyen terme.

Une des raisons de cet échec semble être d’une part l’absence d’expérience préalable des candidats. Sans même évoquer une véritable expérience salariée, beaucoup en effet n’ont jamais travaillé en tant que bénévole ou stagiaire dans une association ou une entreprise ; et n’ont qu’une expérience limitée de l’internationale. Or, au-delà de l’acquisition de compétences spécifiques, ces expériences peuvent valoriser l’engagement militant du candidat, ainsi que ses capacités d’autonomie et d’adaptation. D’autre part, une certaine dissension entre le profil des candidats et leurs aspirations professionnelles peut expliquer leur difficulté d’intégration dans les ONG. Le niveau de qualification académique des candidats à une première mission étant croissant (résultant de plusieurs années d’études et d’un investissement financier important), nombre d’entre eux souhaitent voir leurs qualifications rapidement valorisées à travers des postes à responsabilités, refusant ainsi des opportunités pouvant être considérées comme « dégradantes » (poste d’assistant, statut de volontaire ou de stagiaire). Or, quel que soit le diplôme, il est rare voire impossible d’intégrer directement une ONG internationale sans une solide expérience préalable. Aussi, au-delà des frustrations qui peuvent naitre pour le candidat, ses prétentions parfois disproportionnées peuvent signifier à l’employeur un déficit de connaissance de la part du candidat du domaine de la solidarité, ainsi que du niveau d’expertise et de qualification requis.

Bien que l’ambition soit légitime et moteur de l’engagement, il apparait donc indispensable d’identifier dans un premier temps le secteur spécifique dans lequel le candidat souhaite s’engager (ONG de développement, d’urgence, coopération internationale…), avant d’identifier à travers l’analyse des organigrammes, le type de poste pouvant lui être confié en accord avec son profil en début de carrière, qui lui permettra à moyen et long terme d’évoluer vers d’autres fonctions. Engagées dans la fidélisation et le renforcement de capacités de leur personnel, de nombreuses organisations (Première Urgence Internationale, Solidarité Internationale, Handicap International, ACTED… pour ne citer que certaines ONG françaises) proposent ainsi de nombreux stages, le plus souvent au siège ou parfois sur le terrain, permettant l’acquisition de compétences spécifiques et la prise de responsabilité progressive.

Enfin, et au-delà de l’identification d’une « stratégie » de recrutement et de carrière, les candidats doivent être en mesure de murir consciencieusement leur projet personnel au préalable à chacune de leur candidature, à travers l’appréciation des enjeux et contraintes inhérents aux métiers de la solidarité internationale (éloignement vis-à-vis de la structure familiale et amicale, conditions de vie et contexte sécuritaire parfois précaires, charge de travail…).

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