« Foot of Africa », la réalisation d’un projet professionnel

26.10.2022

« Je me souviens de cette volonté tenace d’intégrer 3A coûte que coûte, c’est bien là un caractère commun à de nombreux 3Ayens : la formule « 3A ou rien ». Pourtant, avant de faire (et d’assumer) ce choix, j’étais contre le principe de payer pour une école. Cette idée-là allait à l’encontre de « l’égalité des chances » telle que je la concevais. Puis, j’ai réfléchi différemment, et en ai conclu qu’il était encore plus insolent de ne pas mettre ce privilège à contribution. Il s’agissait dès lors de profiter de cette chance d’accéder à des études supérieures, quand bien même privées et contre un paquet de billets, en l’utilisant à bon escient. A formation payante, devoir tacite d’être brillante… J’ai bûché pour avoir le concours, motivée par l’idée de troquer l’académie des tiroirs aux carrières prédéfinies pour intégrer celle où l’on invente son parcours de vie. J’ai franchi la frontière, ai intégré une communauté aux rêves tenaces malgré une tendance à l’espoir qui trépasse. Je me souviens de la 3ème année « parallèle » en mode tout schuss, de son rythme trépident, de l’intensité de travail, de ne plus en voir le bout, de craindre de ne pas tenir le coup, des cernes qui s’accumulaient au rythme de la fatigue, … mais où on ne lâchait rien, où l’on s’accrochait, quitte à parfois dérailler. On maintenait le cap, on bossait jusqu’à en devenir rôdés, comme organisés dans notre surmenage, notre tempo démesuré. Mais ce n’était pas insurmontable -rien ne l’est jamais d’ailleurs, on sait la capacité d’adaptation de l’être humain-, c’était malgré tout supportable car nous étions ensemble, solidaires et déterminés. Comme on l’est encore et le demeure. Je me souviens des tous premiers échanges et de ceux qui ont suivi, avec celles et ceux que je compte aujourd’hui parmi mes ami(e)s. Ce on, c’est eux et moi, c’est nous.

A 3A, je me souviens d’une certaine harmonie, d’une cohésion, d’un dialogue omniprésent, en cours, entre deux salles, en « off ». Par contre, je ne me souviens d’aucune animosité ou de quelconque forme d’intolérance. Je me souviens avoir compris qu’en rejoignant 3A, j’avais fait le bon choix. Je me souviens d’y avoir trouvé ce que je cherchais. J’obtenais les outils d’une réflexion posée, mesurée, avec un esprit critique aiguisé, « challengé », nuancé. De quoi refaire le Monde et repenser la Terre avec des clés de lecture solides, et l’ambition sereine. Je me souviens de tout cela, et du reste. L’ambiance, la chair de poule provoquée par ses fameux discours, le sentiment d’appartenance, la fierté d’être « petits mais gentils » (slogan spontané crié par CG lors de l’obtention du Prix « Junior Durable » en 2012), la passion et la niaque à fleur de peau… sans oublier les nuits blanches ultimes à quelques jours de rendre le Projet Pro, où l’on oscille alors entre crise de nerfs, fous rires, où l’on ne sait subitement plus lire ni écrire, encore moins compter, le pire. Mais encore et toujours, on s’accroche et on y croit. Et la première place sur le podium nous le rend bien.

J’ai d’ailleurs poursuivi ce Projet Pro dans la « vraie vie », j’ai débuté en stage et poursuivi en alternance. Et n’étant pas un cas à part, aussi touchée par le « syndrome Génération Y », le « je-me-lasse-aussi-vite-que-je-respire », après deux ans à 3A, j’ai voulu faire un M2 ailleurs. On sait ce qu’on perd mais on ne sait jamais ce qu’on va récolter. Je l’ai expérimenté, et 3A m’a manqué. Je rejoins donc l’IAE de Lyon, en Master Management des Opérations, en Achats (option Qualité). Si vous cherchez le lien, pas la peine, y’en n’a pas, mis à part que je m’intéressais aux achats responsables. A l’IAE, je frôle l’ennui, je reste sur ma faim, j’ai la nostalgie de 3A et me rends compte qu’elle n’a rien à envier à d’autres. Je suis sceptique mais cherche malgré tout à créer des liens parmi le même type de profils conditionnés et formatés, qu’il m’avait coûté de côtoyer pendant 2 ans après le BAC, à l’IUT. Malgré tout, je revois ma copie car j’y rencontre de nouveaux amis, on ne pense pas pareil et c’est aussi ce qui nous enrichit. J’en retiens toute l’importance de la tolérance, qu’importent les parcours de vie, leurs différentes philosophies, tant qu’on cherche à se comprendre dans le dialogue et le respect.

A l’issue de ce M2 en alternance, je ratifie mon engagement à durée indéterminée, je dompte le « syndrome GY », et en avant le CDI. Mon poste de Coordinatrice de Projet m’occupe dès lors à temps plein, bien que je m’adapte au rythme africain... J’ai créé mon job depuis les bancs de 3A, où par l’intermédiaire de Jacques GALLOIS, j’ai rencontré Yves REVOL, PDG du Groupe CLASQUIN et initiateur du Projet "Foot Of Africa" que je suis en charge de monter, entre la France et le Burkina. "Foot Of Africa" est d'abord un challenge. Celui de fabriquer des produits finis en Afrique, dans notre cas des chaussures. Le parti pris est d'impulser un modèle économique viable, facteur d'emplois, qui valorise les savoir-faire, matières et matériaux locaux, pour créer de la valeur sur le territoire et impacter au maximum l'économie locale. Un vaste projet donc, qui m’amène à me rendre régulièrement sur place pour préparer le terrain à l’accueil de la première pierre, non sans difficultés. Les aléas, liés au contexte local, aux différentes manières d’appréhender les choses, culture oblige, sont nombreux. Et par-dessus tout le rapport au temps, notamment quand il s’agit d’Afrique (ce ne sont pas que des à priori). Les facteurs décourageants sont nombreux, et ils démobilisent d’autant quand on y met dès le début beaucoup d’énergie et d’engagement. Mais, la fatalité ne doit pas être une fin en soi, toujours pareil, rien n’est acquis et tout se mérite. Alors on s’accroche, on se bat parfois. On le fait pour tous ces sourires qui nous guident « en terre inconnue » de manière innée et sans compter, en nous inondant de « ça va aller ».

Les conseils que je donnerais à de futurs 3Ayens, sont ceux que j’essaie de m’appliquer à moi-même. Cette idée de ne rien lâcher, de continuer à véhiculer les valeurs et les espoirs qui nous animent. Travailler sur soi, sur son impatience, l’insatisfaction qui nous rattrape souvent malgré nous. Savoir se contenter du peu que l’on a tout en visant plus loin, en gardant l’ambition de meilleurs lendemains, pour les uns et les autres. Mais s’en approcher, de cette « sobriété heureuse » qui nous guette car elle nous veut du bien. Développer sa faculté à se battre contre des moulins à vents, car on sait qu’ils sont nombreux, tenaces et bien armés. Mais y croire encore, se faire confiance et faire confiance à son prochain. Ben ouais, tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. Tant qu’il y a de l’humain, on peut continuer à y croire.

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